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Objectif Souveraineté

Le texte suivant reprend l’intervention faite en conclusion du Colloque “Objectifs souveraineté” organisé au Musée Guimet le 11 décembre 2025 par la Caisse des Dépôts et Consignations et l’Af2i, ainsi que la Tribune.

Tout d’abord à titre personnel je suis très heureux que le thème de la Souveraineté soit revenu sur le devant de la scène médiatique et politique. En effet, depuis la crise du Covid et l’attaque de l’Ukraine en 2022, c’est un monde d’illusions qui s’effondre progressivement devant nous. Or, nous les institutionnels, nous savons qu’illusion et investissement font rarement bon ménage.

Quelles illusions avons-nous perdues ?

  • En premier, nous avons collectivement perdu l’illusion d’un futur certain et planifiable. C’est le retour, par ailleurs bien commenté, d’une incertitude plus réaliste qui oblige à construire des plans B et à se poser la question :  et si … ?
  • En second, nous avons perdu également notre illusion de savoir maîtriser le futur. Collectivement nous avons touché les limites voire l’échec d’un économisme calculatoire qui pouvait s’appliquer à tous les sujets.

Nous avons cru que la technique et le calcul pouvaient organiser et optimiser rationnellement les relations humaines de toutes natures au niveau micro comme macro.

Nous avons cru que la technique et le calcul pouvaient justifier une gouvernance bâtie exclusivement sur des règles. Ce qui est commode car l’application de règles simplifie théoriquement la vie sociale et politique. Plus besoin de délibérer, plus besoin de prendre des décisions engageantes. A tous les niveaux hiérarchiques, chaque intervenant se retranche derrière la conformité, la référence à un modèle, etc. En clair l’application de règles dégagent la responsabilité de chacun face aux conséquences des décisions.

Mais, hélas, cette belle mécanique intellectuelle scientifique et juridique s’est enrayée. elle s’est heurtée à un retour de situations où le critère n’est plus la science mais la puissance.

Puissance au service de choix politiques faits par des pays.

Historiquement il y eut d’abord la Chine, après la stratégie prudente de Deng Xiaoping définie par les 6 directives en « 24 caractères » et appliquant la tactique de Sun Tsu : « remplir les trous » est venu l’objectif de XI Jinping : « reprendre la première place » lancé avec le slogan du 19ème congrès du PCC en 2017 : « Le grand renouveau de la nation ».

Et plus récemment nous avons la publication de la nouvelle “Stratégie de sécurité nationale » des Etats-Unis publié vendredi 5 décembre 2025. Ce document affirme avec vigueur les conséquences du choix de “America first”. Une nouvelle doctrine Monroe avec un corollaire Trump est ainsi définie. Tout doit concourir à renforcer la puissance des Etats-Unis.

Dès lors, et c’est mon deuxième point, en Europe et en France, il faut dorénavant être à la hauteur de ces deux nouvelles donnes en se donnant la puissance pour objectif afin d’être souverain.

Pour être mise en œuvre la souveraineté doit s’accompagner d’objectifs concrets et mesurables. Il est alors nécessaire de disposer d’un concept plus opératoire que celui de souveraineté, mot polysémique et à géométrie variable issu des sciences politiques.

Les concepts les plus compréhensibles et les plus opératoires sont ceux de l’indépendance et de l’interdépendance.

En effet, par grande fonctions régaliennes (sécurité, justice), et par grand besoins individuels (énergie, alimentation, santé) on peut construire un diagnostic d’indépendance ou de dépendance, en regardant les filières industrielles qui concourent à satisfaire ces besoins. En détaillant les chaines de valeur, on peut identifier celles produites en France, dans un pays européen ou dans un autre mai ou potentiellement hostile. 

Sans cet outil de pilotage il sera difficile de convaincre et de rassembler.

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